vendredi 28 août 2020

De l’angélisme au péché collectif

 

L’autre jour, j’avais posté sur un forum chrétien ce lien https://don.aed-france.org/aide-urgence-beyrouth?utm_source=sendinblue&utm_campaign=Beyrouth_sinistr_-_colis_alimentaires_RNO&utm_medium=email vers un appel de l’association Chrétiens d’orient informant de la détresse des chrétiens sinistrés de Beyrouth suite à la dramatique explosion et sollicitant un don par charité chrétienne.

Un frère du forum m’a répondu que « ce genre de chose » n’avait rien à faire ici.

D’où une nouvelle ébullition pour moi…

 Le dimanche, devant le portail de nos églises, nous sommes à deux pas de marcher sur les pieds des miséreux attendant une "piécette » de notre part. Les plus généreux leur attribuent un rapide « bonjour », surtout pas un « bonjour, ça va ? » comme on le fait habituellement…

 Aurions-nous oublié ces deux choses : l’unique commandement est d’aimer Dieu ET son prochain et que nous serons jugés sur l’amour que nous aurons manifesté les uns pour les autres ? En parole et en action. Or, nous vivons la charité par omission. Ce péché par omission n’est-il pas l’arbre qui cache la forêt de tous nos manquements à l’amour du prochain ? Qui est mon prochain me demanderez-vous ? Jésus nous répond : celui dont JE me rends proche, et non l’inverse.

Le silence fait partie de ces péchés collectifs comme le rappelle Mgr Ponthier, le patron des évêques de France en cette déclaration : https://www.lemonde.fr/societe/article/2019/02/17/le-silence-sur-la-pedophilie-est-un-peche-collectif-pour-le-patron-des-eveques-de-france_5424470_3224.html

 L’excellent livre Péché collectif et responsabilité s’ouvre sur cette interrogation :

« Quelle dose d’inconscience ne faut-il pas pour oser parler de péché ? Cette notion ne relève-t-elle pas, désormais, de l'archéologie de la conscience humaine ? Et comment parler de péché collectif sans paraître réactiver d'anciens mythes pessimistes dont l'imprécision nourrirait à la fois les torpeurs fatalistes et les excès fanatiques ? ». Tous les chapitres sont éclairants : https://books.openedition.org/pusl/6233?lang=fr

 

 Il faudrait, pour commencer, lever les malentendus et les suspicions qui font de la notion de péché collectif un repoussoir. Et si un recours renouvelé aux textes et mythes fondateurs de notre tradition judéo-chrétienne nous réservait la surprise d'une libération du lien pervers entre responsabilité et culpabilisme ?

Ecoutons notre pape : "je voudrais une Eglise pauvre, pour les pauvres". A relire ici : https://www.lemonde.fr/europe/article/2013/03/16/pape-francois-je-veux-une-eglise-pauvre-pour-les-pauvres_1849485_3214.html


Le pape François nous invite à déposer nos chapelets le temps de rendre justice aux nécessiteux, prêchant pour une Eglise pauvre, et non seulement pour une Eglise des pauvres. On ne peut donner que ce que l’on a. Peut-être à l’exemple de cette vieille femme donnant une simple piécette de son nécessaire et non de son superflu comme ceux qui font ouvertement don de leur superflu.

Etonnamment sur la revue jésuite la page sur ce sujet est désespérément vide et les commentaires y sont verrouillés :

https://www.revue-christus.com/article/peche-collectif-2725

Pourtant le pape Jean-Paul II avait publié un fascicule relayé par le  Conseil permanent de la Conférence des évêques de France : Qu’as-tu fait de ton frère ? https://www.la-croix.com/Urbi-et-Orbi/Archives/Documentation-catholique-n-2368/Qu-as-tu-fait-de-ton-frere-2013-04-16-946109

 Confesser un tel péché n’est pas chose aisée car la contrition doit s’accompagner de la résolution de tout mettre en œuvre pour ne pas persévérer dans le même péché collectif. Peut-être devons nous utiliser nos chapelets pour recevoir la lumière sur ce que nous devons changer de nos habitudes pour les ‘sanctifier’, tout simplement pour devenir pleinement humains.

 Les adeptes (non repentis) de l’angélisme sont peut-être les moins assurés d’être un jour accueillis par les anges…

 Retrouvons les sources bibliques et les racines de cette problématique:

Péché collectif et responsabilité collective*

L’idée de péché collectif nous est, sans doute, moins facilement compréhensible qu’aux temps bibliques. Nous sommes pétris d’individualisme, et il nous est pénible d’envisager que nous puissions être solidaires, dans le mal, de nos concitoyens. Nous avons, dès lors, tendance à sauter par-dessus les passages bibliques qui évoquent une telle notion. L’Ancien Testament dénonce, à maintes reprises, le péché du peuple d’Israël dans son entier. Mais, dira-t-on, le Nouveau Testament innove et met en avant un appel individuel. Aussi vais-je m’attacher à mettre en évidence des exemples tirés du Nouveau Testament.

Les personnages en état de péché collectif dans le Nouveau Testament


Jésus apostrophe des villes qui semblent faire bloc dans leur refus d’écouter l’Evangile.

Il se mit à invectiver les villes qui avaient vu ses plus nombreux miracles mais n’avaient pas fait pénitence: « Malheur à toi, Chorazin! Malheur à toi, Bethsaïda! Car si les miracles qui ont eu lieu chez vous avaient eu lieu à Tyr et à Sidon, il y a longtemps que, sous le sac et dans la cendre, elles se seraient repenties. Aussi bien, je vous le dis, pour Tyr et Sidon, au jour du jugement, il y aura moins de rigueur que pour vous. Et toi, Capharnaum, crois-tu que tu seras élevée jusqu’au ciel? Jusqu’à l’Hadès tu descendras. Car si les miracles qui ont eu lieu chez toi avaient eu lieu à Sodome, elle subsisterait encore aujourd’hui. Aussi bien, je vous le dis, pour le pays de Sodome il y aura moins de rigueur, au jour du jugement, que pour toi. »1

Lorsque Jésus envoie ses disciples en mission, il leur demande de s’adresser, non pas tant aux individus un par un, mais aux maisons et aux villes2. Les personnes regroupées dans les maisons (le cercle social de base, à l’époque) les accueillent ou les rejettent, de même que des cités entières peuvent les écouter ou les mépriser.

On connaît aussi les invectives que Jésus adresse aux pharisiens et aux scribes en Matthieu 23. Il considère que ces groupes sociaux présentent une attitude suffisamment homogène pour qu’il puisse leur adresser un message unique. A un autre moment, il refuse de faire un miracle en adressant des reproches à une génération entière: il parle de « génération mauvaise et adultère »3.

Prêtons-nous, d’autre part, assez attention aux destinataires des épîtres de Paul? Il s’agit souvent d’Eglises entières. Et, lorsque Paul leur adresse des reproches, il considère que leurs membres sont solidaires dans leurs erreurs: « Galates sans intelligence, qui vous a ensorcelés? » écrit-il par exemple.

Pour compléter, cliquer ici :https://larevuereformee.net/articlerr/n192/peche-collectif-et-responsabilite-collective

https://books.openedition.org/pusl/6299?lang=fr


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